06/11/2009

Un petit boulot

Hautement recommandable, le premier roman de Levison est un polar, pour rire. C'est très immoral, et ca on aime bien: un chômeur fraîchement largué par sa fiancée, harcelé par les organismes de crédit auxquels il doit de fortes sommes, il a vendu sa voiture, sa télé. Il a plus de 3 000 dollars de dettes chez son bookmaker, qui lui propose d’éponger ses dettes et de lui donner 800 dollars s’il accepte de tuer sa femme. Ainsi commence sa carrière de tueur à gages. Et il y prend goût à ce "petit boulot", non par plaisir, mais par désir du travail bien fait, par conscience professionnelle. Et il prospère.

Levison détaille bien les raisons économiques qui poussent Jake à accepter et à considérer ce travail comme un travail ordinaire. Travailler redonne à l’homme sa dignité, et si la seule tache qu'on lui fournit est de flinguer quelqu’un, alors, il faut accomplir son boulot le plus professionnellement possible, sans aucun problème moral.

Il rend palpable l'humiliation du sous-prolétariat : la rage de savoir qu'une décision financière sans aucun lien avec la réalité a entraîné la fermeture de l'usine locale, et a transformé cette cité comme une autre en friche industrielle, où quelques-uns essayent de survivre : "de fait, je n'ai plus de morale. Ma vie a été enlevée par un coup du destin, un caprice de l'économie, un trait de plume dans un bureau de New York. Ma ville est détruite, ma copine est partie, mes amis et moi sommes fauchés en permanence;" (p. 22). Le classe américaine?

Sur fond de désespoir social, Levison tisse le portrait d'un homme qui, après tout, ne cherche qu'un peu de bonheur, et qui doit son succès à ses références cinéphiliques. Il a appris à discuter avec les flics et à se servir d'une arme à feu en regardant des films, il nous apprends que le coup de l'oreiller pour étouffer un coup de feu, ça ne marche pas vraiment...


Iain Levison, Un Petit Boulot, Audiolib